Actuellement, l’article L.2325-35 du Code du travail prévoit les cas de recours à une expertise par le Comité d’Entreprise. L’ordonnance présentée le 31 août maintient la possibilité pour le (nouveau) CSE de recourir aux mêmes expertises mais les contours de ces missions ne sont plus les mêmes.
Les missions d’expertises pourraient être contestées par l’employeur
Pour l’instant, à l’exception de l’expertise technique (art L.2325-38), aucun cadre légal n’est prévu en cas de désaccord de l’employeur sur le recours à une expertise prévue par le Code du travail.
Si l’employeur ne participe toujours pas au vote sur le principe du recours à l’expertise, l’article L.2315-84 de l’ordonnance crée un cadre juridique nouveau, lui permettant de contester plusieurs points : sa nécessité, son coût, son étendue, sa durée et le choix de l’expert.
Le processus de désignation d’un expert se ferait en trois temps bien distincts
Afin d’obtenir l’assistance d’un expert, le CSE devrait suivre la procédure suivante : délibérer sur le recours à une expertise (T1), désigner l’expert (T2), et définir un cahier des charges. Enfin, l’expert notifierait à l’employeur le coût prévisionnel, l’étendue et la durée de l’expertise (T3).Pour cela, un décret à paraître devrait fixer :
- le délai séparant T1 de T2 (article L.2315-78) ;
- et le délai séparant T2 de T3 (article L.2315-79).
Le législateur semble vouloir marquer ces trois temps afin de permettre à l’employeur, à chacune des étapes, de saisir le juge judiciaire (dans un délai de 5 jours) s’il entendait contester un des points vus précédemment.
Le CSE participerait au financement de certaines expertises
Alors que l’ensemble des missions légales est actuellement financé en totalité par l’employeur (à l’exception de la mission d’examen des orientations stratégiques), seules quatre le seraient après l’application des ordonnances. Il s’agit des expertises prévues lors :
- de la consultation annuelle relative à la situation économique et financière ;
- de la consultation annuelle relative à la politique sociale de l’entreprise ;
- du licenciement économique d’au moins dix salariés ;
- et de la constatation d’un risque grave.
20% des frais seraient pris en charge par le CSE sur son budget de fonctionnement pour toutes les autres expertises, soit lors :
- de la consultation sur les orientations stratégiques ;
- du déclenchement d’un droit d’alerte ;
- d’une opération de concentration ;
- d’une offre publique d’acquisition ;
- de la négociation des accords suivants : accord de maintien d’emplois en cas de graves difficultés économiques conjoncturelles dans l’entreprise ; accord de préservation ou de développement de l’emploi ; accord de PSE.
Si l’objectif de cette disposition semble de nature disciplinaire, de sorte à associer davantage les parties prenantes au cahier des charges de la mission, son impact sur le recours à l’assistance d’un expert serait à mesurer.
Le financement partiel de l’expertise ne serait plus plafonné
L’ordonnance ne prévoit pas de plafonnement de la participation du CSE au financement de ces autres missions légales. Le plafonnement actuel à hauteur d’un tiers dudit budget concernant la consultation sur les orientations stratégiques disparaîtrait.
Le non-plafonnement du financement partiel de ces missions pourrait constituer un frein au recours à l’expertise, qui plus est pour les petites et moyennes entités dont la prise en charge pourrait vite représenter plus du tiers de leur budget.
L’étanchéité des budgets du CE serait mise en cause
Concernant le principe de dualité des budgets (fonctionnement & activités sociales et culturelles), le CSE disposerait d’une « liberté » que le comité d’entreprise n’a pas actuellement. Il pourrait décider de transférer tout ou partie du montant de l’excédent annuel de son budget de fonctionnement à la subvention destinée aux activités sociales et culturelles et inversement (articles L.2315-57 et L.2312-84).
Le nombre d’expertises annuelles pourrait être anticipé
Le projet d’ordonnance de la loi Travail prévoit la possibilité que, dans le cadre des trois consultations annuelles, le nombre d’expertises soit déterminé dans un accord négocié au niveau de l’entreprise, ou, à défaut, au niveau du CSE (article L2315-74). Cet accord pourrait être conclu pour une ou plusieurs années, ce qui interroge sur la volonté du législateur de restreindre le droit de recourir à une expertise.
Il serait possible d’éviter la procédure liée au PSE par la conclusion d’un accord collectif prévoyant une « rupture conventionnelle collective »
La « Loi Travail XXL » prévoit également la possibilité de négocier un accord collectif permettant d’exclure tout licenciement. L’application de cet accord nécessiterait la négociation de plusieurs items obligatoires tels que le nombre maximal de départs envisagés, les suppressions d’emplois associées et sa durée de mise en œuvre.