Une décision de la Cour d’appel de Nancy, rendu le 6 février 2023, précise les conditions de validité des Accords de Performance Collective (APC).
Les Accords de Performance Collective (APC), instaurés par les ordonnances Macron, ont généré peu de contentieux. En effet, le dispositif est utilisé par les entreprises avec parcimonie, moins de 900 accords ayant été enregistrés depuis leur introduction en novembre 2018. Par ailleurs, la grande liberté laissée aux négociateurs réduit l’éventualité de litiges.
La décision de la Cour d’appel de Nancy d’annuler un accord de performance collective le 6 février 2023 est, à ce titre, exceptionnelle. Dans cette affaire, une société avait conclu avec les membres du CSE un accord de performance collective (APC) axé sur la mobilité interne. Cet accord visait à regrouper les différents établissements en un site unique. Il avait entraîné le licenciement de trois salariés qui ont refusé de signer l’avenant à leur contrat de travail.
Ces derniers, accompagnés par leur organisation syndicale, avaient contesté la validité de l’accord devant les tribunaux. La décision de la cour d’appel de Nancy permet de préciser les conditions de validité des APC.
Un Accord de Performance Collective (APC) peut-il être négocié pour fermer un site ?
Les requérants contestaient la validité d’un accord qui permettait la fermeture d’un site de l’entreprise, estimant que cette finalité n’entrait pas dans le cadre des Accords de Performance collective (APC). Leur argumentation faisait référence aux questions-réponses du ministère du Travail de juillet 2020.
Selon ce document, un APC « ne pouvait pas être utilisé pour la fermeture définitive d’un site ou d’un établissement si cela entraînait un déménagement de l’ensemble des postes et fonctions du site ou de l’établissement, et si les conditions de reclassement proposées par l’employeur présentaient des caractéristiques telles qu’un refus de la majorité des salariés concernés pouvait être anticipé avec un degré de certitude élevé ».
La Cour d’appel de Nancy a jugé qu’un accord de performance collective (APC) peut permettre la fermeture d’un site d’entreprise si :
- cela est prévu dans l’accord
- avec une clause de mobilité géographique.
En outre, la Cour a souligné que les questions-réponses du ministère du Travail ne lient pas le juge, et que dans ce cas précis, la fermeture s’apparentait à une simple mobilité des salariés vers un autre établissement de l’entreprise.
Un Accord de Performance Collective (APC) peut-il être mis en place pour des « compressions d’effectifs » ?
La cour d’appel a tranché un autre point. Les salariés qui n’ont pas signé l’accord ont été licenciés et n’ont pas été remplacés. Cela invalide-il l’accord ?
Rappelons que le législateur prohibe la suppression d’effectifs dans les cas spécifiques ;
- L’ancien article 2242-21 du Code du travail stipulait que l’accord de mobilité interne ne devait pas comporter de réductions d’effectifs.
- La rupture conventionnelle collective exclut tout licenciement.
Qu’en est-il des dispositions de l’Accord de Performance Collective (APC) ? La cour d’appel a rappelé que, conformément à l’article L. 2254-2 du Code du travail, l’APC peut aménager :
- les conditions de travail, y compris la durée et l’organisation du travail,
- la rémunération
- et la mobilité professionnelle et géographique des salariés.
Cependant, l’APC ne peut pas entraîner une suppression de postes au sein de l’entreprise.
Pour cette raison, l’employeur aurait dû compenser le remplacement des salariés licenciés par l’embauche de nouveaux salariés. Au lieu de cela, les tâches précédemment assumées par les salariés licenciés ont été réparties entre deux autres salariés de l’entreprise.
La cour d’appel a donc conclu que l’APC était irrégulier en raison de cette première violation.
Un APC peut-il être négocié par de simples élus du CSE, en l’absence de délégués syndicaux ?
Le tribunal a considéré qu’un Accord de Performance Collective (APC) peut être conclu avec des salariés mandatés ou des membres de la délégation du personnel du CSE dans une entreprise de moins de 50 salariés.
Cette interprétation repose sur une lecture combinée des articles L. 2254-2 et L. 2232-23-1 du Code du travail. La Cour confirme que le Code du travail ne contient aucune disposition excluant la conclusion d’un APC dans certaines entreprises. Elle ajoute que la restriction du recours à la négociation dérogatoire serait en contradiction avec les ordonnances Macron qui visent à favoriser un accès direct et simple à la négociation dans toutes les entreprises.
Néanmoins, les articles L. 2232-27 et suivants du Code du travail énoncent les règles de négociation dans les entreprises sans Délégué Syndical, entre autres :
- l’indépendance des négociateurs,
- l’élaboration conjointe du projet d’accord
- et la concertation avec les salariés.
Dans cette affaire, les requérants ont soutenu que les salariés n’ont jamais été consultés pendant la négociation, alors que l’employeur argumentait que c’était le rôle des membres de la délégation du CSE d’informer et d’interroger les salariés. La cour d’appel a confirmé que c’était à l’employeur de s’assurer que les salariés soient consultés. Par conséquent, l’absence de consultation des salariés a entaché la régularité de l’accord.
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