En 2020, l’heure est au bilan pour l’index égalité Femmes / Hommes, après une année de mise en place progressive. Alors, que révèle leur publication sur l’état de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes en France ? Constitue-t-il un indicateur efficace de lutte contre les discriminations genrées au travail ? Comment le CSE peut-il se saisir de cet outil dans le cadre de sa mission économique et sociale ?
L’index égalité Femmes Hommes : qu’est-ce qu’est ?
Genèse
Créé en 2018 par la loi pour la Liberté de choisir son avenir professionnel, l’index égalité Femmes Hommes vise à refléter l’état d’avancement de l’égalité entre les femmes et les hommes au sein de l’entreprise.
Le calcul de l’index s’est d’abord imposé aux entreprises de plus de 1000 salariés avant le 1er mars 2019. L’obligation s’est ensuite étendue aux entreprises de plus de 250 salariés avant le 1er septembre 2019. Pour enfin concerner également l’ensemble des entreprises de plus de 50 salariés avant le 1er mars 2020.
Calcul
L’index constitue un agrégat de 4 à 5 critères, selon la taille de l’entreprise. Il permet ainsi de refléter différents aspects de l’égalité professionnelle :
- le niveau de rémunération : l’écart de rémunération femmes-hommes est noté sur 40 points.
- les augmentations salariales : l’écart de taux d’augmentations individuelles (hors promotion) entre les femmes et les hommes est noté sur 20 points (entreprises de plus de 250 salariés) ou sur 35 points (entreprises de moins de 250 salariés)
- l’évolution professionnelle : l’écart de taux de promotions entre les hommes et les femmes est noté sur 15 points pour les entreprises de plus de 250 salariés. En revanche, son calcul n’est par requis pour les entreprises de moins de 250 salariés.
- le rattrapage salarial après un congé maternité : le pourcentage de salariées ayant bénéficié d’une augmentation au retour de congé maternité s’apprécie sur 15 points.
- la représentation dans les plus hauts postes : le nombre de salariés du sexe sous-représenté parmi les 10 salariés ayant perçu les plus hautes rémunérations est noté sur 10 points.
L’Index correspond ainsi à une note sur 100.
Obligation de résultat
En-deçà d’une note de 75 sur 100, l’entreprise dispose de 3 ans pour mettre en place des mesures correctrices. Si, à l’issue de ce délai, sa note ne se hisse pas à plus de 75, elle s’expose alors à des pénalités financières pouvant atteindre 1% de sa masse salariale. Il s’agit donc d’une véritable obligation de résultat pour les entreprises.
De même, cette pénalité financière peut s’appliquer en cas de non publication de l’index.
Le bilan 2020 de l’index égalité Femmes Hommes
Les résultats 2020
La publication des index égalité Femmes / Hommes au 1er mars 2020 (sur les données 2019) fait ressortir une note moyenne de 87 au niveau national (sur plus d’un millier d’entreprises). Par rapport à l’an dernier, l’amélioration est sensible (+4 points).
Cette tendance s’observe sur la totalité des régions. Les notes par région ne s’écartent que peu de la moyenne nationale, illustrant une relative uniformité sur le territoire.
Si la majorité des entreprises a relevé leur note, la Ministre du Travail Muriel Pénicaud n’a toutefois pas hésité à fustiger certains grands groupes sur leurs notes peu vertueuses, parmi lesquelles Derichebourg (62),Foncia Carrières et Compétences (66), Securitas (69) et Go Sport (74).
Source : Ministère du Travail
Bien que surprenante, cette mise au pilori publique avait-elle pour but d’inviter les entreprises à agir plus concrètement ? En effet, il y a lieu de le penser puisque, malgré les évolutions favorables, Muriel Pénicaud déplore que les femmes continuent d’afficher un salaire inférieur d’environ 25% à celui des hommes (tout poste confondus). Cet écart redescend à 9% à poste et âge égaux.
Plus particulièrement, elle révèle que les critères du pourcentage d’augmentation après un congé maternité et de la parité dans les 10 plus hauts salaires sont les moins respectés.
Un dispositif révélateur mais imparfait ?
L’index égalité Femmes Hommes a le mérite de mettre publiquement en lumière la réalité des situations en matière d’égalité professionnelle au sein de nos entreprises françaises. D’autant plus que la relative simplicité de la grille de lecture facilite la comparaison entre celles-ci. En outre, l’amélioration rapide de la note moyenne nationale semble témoigner de l’efficacité de cet outil. Preuve en est, la chute du nombre d’entreprises sous le seuil de 75 entre 2018 et 2019. La proportion est passée de 19% à 5% (voir graphiques ci-dessous). Toutefois, le changement de périmètre d’entreprises entre les deux années peut également expliquer cette forte évolution.
En outre, à l’approche des cinquante ans de la loi “A travail égal, salaire égal”, force est de constater que les écarts persistent. Ce constat, face à la fulgurance de la progression de l’index égalité Femmes / Hommes des entreprises, interroge sur la fiabilité de cet outil.
Par ailleurs, compte tenu de la remontée des notes, le seuil de 75 est-il toujours pertinent ? Demeure-t-il assez ambitieux pour rallier les entreprises à la lutte contre les écarts entre les femmes et les hommes ?
Enfin, notons un biais dans le calcul de l’index puisque les mesures correctrices pourraient avoir tendance à faire baisser la note. Par exemple, un rattrapage salarial pourrait affecter le critère de l’écart de taux d’augmentation entre les femmes et les hommes..
L’index égalité Femmes Hommes : un outil pour le CSE
L’employeur doit communiquer l’index Egalité Femmes Hommes au CSE. Il servira en particulier dans le cadre de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise, au cours duquel le CSE devra donner un avis sur l’égalité Femmes Hommes.
Mais bien qu’utile, cet outil reste limité. En effet, pour lutter contre les inégalités entre les sexes, le CSE ne pourra s’en contenter. Il devra également s’appuyer sur les informations données dans la BDES. En outre, le CSE peut faire appel à un expert pour l’assister dans le cadre de cette consultation.
En effet, l’avis du CSE sur ce thème nécessite une argumentation solide. C’est sur cette base que les délégués syndicaux devront ensuite négocier auprès de la Direction un accord égalité Femmes / Hommes (et Qualité de Vie au Travail).