Début 2023, la loi dite « Descrozailles » ou « Egalim 3 » a été adoptée par le Parlement. Cette loi, soutenue par les syndicats agricoles et les industriels clarifient certains dispositifs précédents et apporte de nouvelles contraintes décriées par les distributeurs. Néanmoins, la persistance de l’inflation fait craindre un retour en arrière.
Lois « Egalim 1 » et Egalim 2 : un échec à protéger les revenus des producteurs ?
A la suite des Etats Généraux de l’Alimentation en 2017 (Egalim), les pouvoirs publics ont adopté une série de législations afin de rééquilibrer les négociations entre les différents acteurs de la filière.
Loi Egalim 1 promulguée en 2018
Le 30 octobre 2018 voit apparaitre la 1ère loi Egalim avec l’objectif de rééquilibrer les relations commerciales entre producteurs et grande distribution. Eléments clés de la loi :
- Détermination du prix des produits agricoles à partir d’indicateurs de coûts de production et de marché ;
- Facilitation de la mise en œuvre des clauses de renégociation ;
- Expérimentation sur deux ans du relèvement du seuil de revente à perte de 10 % ;
- Expérimentation sur deux ans d’un encadrement des promotions en valeur (34 %) et en volume (25 %).
Selon le “Rapport de la mission d’enquête” du Ministère de l’Agriculture en mars 2021, les mesures ont rapporté 550 millions d’euros, bien que cette somme n’ait pas bénéficié exclusivement aux agriculteurs, mais aussi aux distributeurs et industriels.
Loi Egalim 2 adoptée en 2021
La 2ème version de la loi adopté le 18 octobre 2021 visait à favoriser la transparence et une meilleure rémunération des agriculteurs. Eléments clés de la loi :
- Contrat écrit sur 3 ans entre un producteur et son 1er acheteur, intégrant notamment une formule de prix qui tienne compte d’un indicateur portant sur les coûts de production ;
- Révision automatique du prix selon des indicateurs de coûts de production et de prix de marché ;
- Non négociabilité de la matière première agricole (MPA) entre l’industriel et le distributeur dès lors que le produit comporte 50% de matière première agricole, hors marque de distributeur ;
- Mise en œuvre d’un label « rémunéra-score » ;
- Amélioration de la traçabilité des produits.
Les résultats des 2 premières lois Egalim
Le rapport de l’IGF avait souligné la contribution positive d’Egalim 2 à la préservation du revenu des éleveurs. En effet, les prix de vente du secteur agricole ont progressé de 27,5 % entre 2019 et 2022 (93 % de hausse des prix des céréales depuis 2019, 8 % pour la viande, 23 % pour le lait, 14 % pour les légumes).
Les prix de vente de l’industrie agroalimentaire ont, quant à eux, progressé de 17,5 % entre 2019 et 2022. Pour autant, le secteur n’a pas augmenté sa marge en 2022 et la hausse des prix s’explique à 85 % par celle des intrants.
En raison des nombreux conflits entre industriels et distributeurs en 2022, une initiative législative visant à renforcer le poids des industriels dans les négociations commerciales a été adoptée. Cette loi est soutenue par les syndicats agricoles et les industriels. Elle est en revanche décriée par les distributeurs.
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Egalim 3 : Nouvelle tentative “d’équilibrage” des négociations et relations commerciales
En raison des nombreux conflits entre industriels et distributeurs en 2022, par conséquent, les législateurs ont adopté une initiative législative visant à renforcer le poids des industriels dans les négociations commerciales. De plus, cette loi est soutenue par les syndicats agricoles et les industriels. Cependant, elle est en revanche décriée par les distributeurs.. Dans ce cadre, les différentes mesures adoptées poursuivent les objectifs de :
- sécuriser les chaînes d’approvisionnement,
- prolonger durablement les dispositions actuellement non définitives,
- parfaire les conditions de transparence et de bonne foi qui doivent s’appliquer à la négociation pour en équilibrer le rapport de forces économique.
Les principaux apports de cette loi :
- Prorogation de deux ans du relèvement de 10 % du seuil de revente à perte pour les produits alimentaires. Exception des fruits et légumes qui souffrent de l’inflation et de la concurrence des produits du sud de l’Europe.
- Extension aux produits d’hygiène-beauté de la limitation des promotions à 35 % du prix initial. Avec Egalim 1, cette mesure était exclusivement réservée aux produits alimentaires.
- Soumission des centrales d’achat européennes à la réglementation française (les distributeurs ont promis de contester cette disposition au niveau de l’Europe) pour limiter les contournements de la loi par les distributeurs.
- Possibilité pour les industriels d’arrêter les livraisons de produits, en cas de désaccord entre une enseigne et un fournisseur le 1er mars 2023. Les distributeurs critiquent vivement ces mesures. Avant cette date, si les parties ne parvenaient pas à s’entendre, elles maintenaient le tarif de l’année précédente en vigueur, et les tribunaux pouvaient traduire l’industriel qui souhaitait mettre fin à cette relation commerciale..
- Plafonnement du montant des pénalités logistiques infligées entre fournisseurs et distributeurs à 2 % de la valeur des produits commandés
- EGALIM 3 renforce la non-négociabilité des matières premières agricoles avec un tiers indépendant, avant la conclusion du contrat. Cette mesure s’applique également aux produits de marque distributeur (MDD) pour garantir la transparence et la stabilité des coûts. L’intervention du certificateur indépendant survient deux fois, conformément au principe de transparence. L’objectif est de protéger les intérêts des agriculteurs et de sécuriser les chaînes d’approvisionnement alimentaire.
Les lois Egalim : une inflation des prix sans retour en arrière ?
La persistance de l’inflation tout au long de 2023, fait craindre une nouvelle révision avant la fin de l’année. C’est le souhait du ministre de l’Économie, Bruno Le Maire.
Ce dernier avait convoqué à Bercy les distributeurs et industriels respectivement les 30 et 31 août pour négocier des baisses de tarifs sur les produits. Aux termes des discussions, trois engagements avaient été pris :
- La baisse ou le blocage des prix sur 5 000 références (contre 1 500 jusqu’à aujourd’hui),
- La répercussion obligatoire et immédiate en magasins des prix revus à la baisse par les industriels,
- et la réouverture des négociations commerciales dès ce mois de septembre, au lieu du 1er novembre, pour les conclure au début de l’année 2024 et non fin février, afin d’accélérer les baisses de prix.
« Il y aura un texte de loi, sans doute dans le courant du mois d’octobre, pour avancer ces négociations commerciales qui devaient aboutir en mars 2024 et qui s’achèveront au terme de l’année 2023, à une ou deux semaines près », a déclaré le ministre sur BFM TV le 3 septembre. « Dans ce bras de fer où chacun se renvoie la balle – distributeurs et industriels –, il fallait mettre un coup d’arrêt », a insisté Bruno Le Maire, pour qui « industriels et distributeurs doivent jouer le jeu et ce jeu sera contrôlé et sanctionné le cas échéant. On va accélérer la lutte contre l’inflation et stopper définitivement la spirale inflationniste », a-t-il assuré.
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