Décision inédite le 26 juin 2019 (1) : le tribunal de grande instance (TGI) de Lyon a validé le recours à expertise par le CHSCT après une mise en demeure du directeur de la DIRECCTE (2) . Or, l’article L.4614-12 du Code du Travail ne prévoit que deux cas de recours, manifestement absents :
- un projet important modifiant les conditions de travail
- un risque grave, mais
Le CHSCT, et désormais le CSE, peut donc recourir à une expertise en dehors des deux cas prévus par la loi.
Revenons donc à ce cas de jurisprudence dans le détail.
L’inspecteur du travail constate l’existence de risques psychosociaux sur un des sites de l’entreprise Prosegur. Le directeur de la DIRECCTE met alors l’employeur en demeure en juin 2016 de procéder à une expertise dont la réalisation serait confiée à un cabinet extérieur, qui serait désigné par le CHSCT.
La mise en demeure de la DIRECCTE s’appuie sur l’article L.4721 du Code du travail. Celui-ci explique que, si une « situation dangereuse » est constatée par l’inspecteur du travail, le directeur de la DIRECCTE peut mettre en demeure l’employeur de « prendre toutes mesures utiles pour y remédier », si ce constat résulte :
- D’un non-respect par l’employeur des principes généraux de prévention,
- D’une infraction à l’obligation générale de santé et de sécurité.
Le CHSCT décide alors, en mars 2017, de désigner un cabinet d’expertise pour réaliser ce diagnostic. Un mois plus tard, l’employeur demande de faire annuler cette délibération devant le tribunal de grande instance. L’employeur forme ensuite un recours devant le ministre du travail en juillet 2017, contre la mise en demeure de la DIRECCTE. Le Ministre ne répondra jamais.
Une expertise du CHSCT fondée sur la mise en demeure de la DIRECCTE
Alors l’expertise décidée par le CHSCT, sur le fondement de la mise en demeure du directeur de la DIRECCTE, est-elle valable ?
L’employeur repose son argumentaire sur le fait que l’expertise CHSCT ne peut avoir comme fondement qu’un risque grave ou un projet important. Il conteste donc sa réalisation. Le CHSCT n’a en effet pas montré l’existence de ce risque grave lors de sa délibération. Sa décision est uniquement fondée sur la mise en demeure de la DIRECCTE.
Les juges considèrent alors les membres du CHSCT dans leur bon droit, et rejettent la demande d’annulation de l’expertise par l’employeur.
Ce jugement, inédit, ouvre ainsi une nouvelle possibilité de recours à expertise. Elle permet également de mettre en valeur le rôle et les interactions des différents intervenants extérieurs travaillant sur les questions de santé au travail :
- l’inspecteur du travail et de façon plus globale la DIRECCTE,
- les membres du CHSCT ou bien désormais du CSE,
- ainsi que des consultants/experts.
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(1) Cass. Soc., 26 juin 2019, n°17-22, 080
(2) Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi