Fatigué le législateur ! A force de modifier le Code du travail, il a oublié d’y intégrer le droit européen et ce, malgré un rappel de la Cour de cassation : les salariés en congé maladie ont bien le droit à l’acquisition des congés payés.
L’article L.3141-5 du Code du travail liste les absences assimilées à du travail effectif ouvrant droit à des congés payés. Or, l’arrêt de travail pour maladie non professionnelle n’y figure pas. Le salarié perd ainsi le bénéfice de 2,5 jours de congés payés par mois d’arrêt, en contradiction avec une directive européenne du 4 novembre 2003 sur le temps de travail.
En 2013, soit 10 ans après sa parution, la Cour de cassation a rappelé au législateur la nécessité de modifier l’article L.3141-5 « afin d’éviter une action en manquement contre la France et des actions en responsabilité contre l’État du fait d’une mise en œuvre défectueuse de la directive ».
Concrètement, l’acquis en France est supérieur au minimum de quatre semaines de congés payés annuels garantis à tous les salariés à l’article 7.1 de cette directive, ce qui pourrait motiver l’absence de sa traduction en droit national.
La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), dans un arrêt rendu le 24 janvier 2012 (affaire Dominguez), a jugé que le droit communautaire n’est pas respecté. Ne faisant aucune distinction entre les salariés en arrêt pour maladie ou pour accident du travail et ceux ayant travaillé sur la même période, l’article L.3141-5 ne peut les exclure des périodes d’acquisition des congés payés.
Privé de 12,5 jours de congés payés en raison d’une période de maladie, un salarié a saisi le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand et obtenu gain de cause. Dans son jugement du 6 avril 2016, le Tribunal condamne l’État à indemniser le salarié. Pour le Tribunal, le défaut de transposition de la directive européenne étant « susceptible d’engager la responsabilité de l’État » et sa transposition « revêt le caractère d’une obligation constitutionnelle ».
Rendue en première instance, cette décision est susceptible de faire l’objet d’un recours. De plus, à l’heure actuelle, aucune modification du Code du travail sur le sujet n’est envisagée. Cette situation obligerait les salariés s’estimant lésés, à agir individuellement en justice. Se pose alors la question de la prescription : de 3 ans en matière de salaires, celle-ci ne peut-elle pas, en présence d’une faute de l’État, être remplacée par la prescription trentenaire civile ?
Sources :
Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, 6 avril 2016, n° 1500608
Directive européenne 2003/88/CE du 4 novembre 2003 sur l’aménagement du temps de travail