Par ces temps de maigres avancées du pouvoir d’achat, ses avantages semblent emporter les faveurs aussi bien des salariés, de leurs organisations syndicales et des entreprises. Mais quel est le coût de la subrogation ? Pour autant qu’il y en ait un…
Juridiquement, la subrogation est le transfert des droits du créancier à celui qui a effectué le paiement du au créancier et résulte soit d’une convention soit des dispositions légales (1). En l’occurrence, l’entreprise, en vertu d’un accord ou d’une convention de branche, maintiendra le salaire à hauteur des indemnités prévues par le régime de prévoyance de la branche ou de l’entreprise, au moment de l’absence du salarié. Elle récupère ces droits auprès de la sécurité sociale et du régime de prévoyance. En somme, il s’agit d’une avance de trésorerie que l’entreprise accorde à ses salariés, théoriquement sans coût à l’exception d’une éventuelle perte d’intérêts.
On ne peut comprendre les notions de coût de ce dispositif sans intégrer les évolutions technologiques de ces dernières décennies.
Dans les années 1990, un arrêt de travail entraînait pour le salarié, une perte « sèche » sur sa paie du mois. La sécurité sociale lui versait des indemnités journalières (IJSS) après avoir reçu une attestation de perte de salaire de l’employeur, l’arrêt de travail du médecin et la feuille de soins. Pour les accidents du travail, d’autres documents s’ajoutaient à cette liste. Le bordereau des IJSS devait être fourni au régime de prévoyance qui calculait et versait l’éventuel complément d’indemnisation. Tout ce traitement pouvait prendre plusieurs semaines et mobilisait du personnel dans l’entreprise et à la sécurité sociale. Les employeurs (à part quelques entreprises affichant une image « sociale ») refusaient systématiquement d’instaurer la subrogation en raison de « son coût élevé ». Une image persistante…
Aujourd’hui, la transmission aussi bien des documents que des fonds s’effectuent par les moyens informatiques. Le coût du traitement des dossiers en termes de frais de personnel pour l’entreprise est réduit au stricte minimum et parfois transféré au régime de prévoyance, voire sous-traité à un courtier.
L’avance de trésorerie, du fait des remboursements plus rapides, nécessite une enveloppe globale moins lourde car la durée du « prêt » est réduite. Cette enveloppe peut éventuellement être mise à disposition par le régime de prévoyance lui-même sur des provisions constituées par ailleurs (légales, le risque décès, etc.).
Ainsi le coût de la subrogation a nettement diminué, frais de gestion, immobilisations financières et pertes de taux d’intérêt étant largement maîtrisés. Dans ces conditions, cette avance de trésorerie aux salariés peut être plus intéressante pour l’entreprise que d’autres formes de placement. En particulier, si elle s’accompagne d’économies liées à un « assainissement » des garanties du régime de prévoyance.
Pour les représentants des salariés, il s’agit de bien mesurer les contreparties consenties en échange de cette avancée sociale d’autant plus que la dématérialisation des justificatifs (2) rend les salariés et leurs délégués moins susceptibles à déceler les anomalies éventuelles.
Notes :
(1) Article 1249 du Code Civil
(2) Bordereau de remboursement des IJSS, indemnités complémentaires et bientôt, bulletins de salaire