Inflation, taux de croissance… Le point commun entre ces indicateurs ? Il s’agit de moyennes ! Et, ces dernières années, ils sont proches – certains n’hésitent pas à exploiter politiquement cette proximité pour proposer un changement de l’indexation des augmentations de salaire. Essayons de comprendre…
L’inflation est « la perte du pouvoir d’achat de la monnaie matérialisée par une augmentation générale et durable des prix ». La déflation est le contraire : une baisse générale et durable des prix. L’inflation ou la déflation sont mesurées au moyen d’un indice des prix à la consommation (IPC) établi par l’INSEE, le fameux « panier de la ménagère » (1).
En 2010, certains produits ont connu des hausses spectaculaires : fioul domestique +23.2%, gazole et GPL +14.6%, légumes frais +11%, l’assurance automobile +6.6%, alors que d’autres ont enregistré des baisses toutes aussi singuliers que les caméscopes, -17,6% (2).
Selon la composition de sa consommation, parts de loyer/emprunts immobiliers, énergie, transports, aliments, etc. l’inflation subie par chaque foyer peut varier de façon spectaculaire. L’INSEE propose un outil de calcul de l’inflation « personnelle » (3).
Le système actuel de revalorisation des salaires et notamment du SMIC se base donc sur une inflation moyenne. On constate une évolution de l’indice des prix et on négocie une augmentation de salaire la plus proche possible. C’est donc toujours le salarié qui est en attente et qui perd du pouvoir d’achat tant que l’augmentation ne dépasse pas significativement l’évolution de l’inflation.
Cette inflation est décriée comme le mal absolu et l’une des missions de la Banque Centrale Européenne est de la maîtriser. Selon certains économistes, un relâchement limité serait bénéfique : une inflation s’établissant autour de 5% permettrait d’améliorer le taux de croissance en redistribuant du pouvoir d’achat aux consommateurs et ainsi de relancer la consommation. Les accédants à la propriété par exemple, verraient une amélioration de leurs ressources par rapport aux taux d’intérêt fixes des prêts contractés auprès des banques ces dernières années.
Contrairement aux idées reçues, la déflation, la crainte absolue du monde financier, ferait gagner du pouvoir d’achat au salarié, sa paie n’évoluant plus mais les prix reculant. Les acheteurs de caméscopes ou de télévisions, notamment, profitent de la déflation (baisse des prix) dans ce secteur de biens consommables.
En réalité, ce sont les extrêmes, l’hyperinflation ou la récession, sur de longues périodes qui présentent un danger avec des conséquences durables sur l’emploi et les acquis sociaux.
Le taux de croissance est le taux de variation du Produit Intérieur Brut (PIB). On utilise souvent la croissance du PIB par habitant comme indication de l’amélioration de la richesse individuelle, assimilée au niveau de vie.
Certains économistes critiquent l’utilisation du PIB qui ne reflète ni la nature de l’activité économique, ni l’impact qu’elle peut avoir, mais seulement l’activité économique. L’effet négatif sur l’environnement tout comme les activités positives non marchandes et non administratives, comme le travail domestique, le bénévolat, l’art ou les activités altruistes (ex. le logiciel libre) en sont exclues. Quant au taux de croissance, il dissimule les inégalités ; « les riches peuvent devenir plus riches » sans l’affecter, tant que les pauvres s’appauvrissent.
Dans l’absolu, si au cours d’une année, l’augmentation des prix est de 5%, l’évolution du taux de croissance sera également de 5% sans qu’il y ait d’amélioration de la production vendue. Il faut que le PIB augmente au-delà de l’inflation pour que cet indicateur ait un effet bénéfique. Avec une inflation sur un an autour de 2% et une croissance autour de 1,5%, l’augmentation des salaires prend le pas sur l’évolution des richesses générées par la production française (industrielle, agricole, financière, tertiaire…).
Indexer le SMIC, et par voie de conséquence, l’ensemble des augmentations de salaire, sur le taux de croissance reviendrait donc à faire partager les risques des entreprises avec les salariés. Au lieu de bénéficier d’une relative garantie de leur pouvoir d’achat, ils seraient liés à l’amélioration de la production et donc de la santé des entreprises françaises. On pourrait imaginer certaines produire leur propre taux de croissance pour les salariés payés au-delà du SMIC.
En conclusion, cette proposition, hautement idéologique, renverse le principe historique que l’entrepreneur assume seul, les risques d’entreprise.
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Notes
(1) Le SMIC est indexé sur l’indice des prix à la consommation hors tabac des ménages urbains dont le chef est ouvrier ou employé alors que l’inflation est mesurée par l’indice des prix à la consommation de l’ensemble des ménages en France (métropole et DOM).
(2) Explorez cette page pour en savoir davantage.
(3) L’INSEE vous propose un outil de calcul de l’augmentation des prix personnalisé, ici.
Compte tenu des variations importantes qu’il peut avoir, n’hésitez pas à lancer des enquêtes sur le pouvoir d’achat des employés de votre entreprise.