La réforme des retraites cache un transfert de charges vers les régimes de prévoyance des salariés.
Depuis plusieurs années, l’évolution démographique de la France a des effets positifs sur les régimes de prévoyance des entreprises et/ou des branches professionnelles. La possibilité de partir en retraite à 60 ans, voire avant, que cela soit contraint ou non, a éloigné le risque de décès des salariés en activité. Or, les régimes complémentaires avaient l’habitude de constituer des réserves considérables pour financer les sinistres sans impacter brusquement les cotisations. Ce risque reculant, alors que dans le même temps les dépenses de santé augmentent, les assureurs ont libéré progressivement une partie de ces provisions pour atténuer les hausses de cotisations généralement cofinancés par les employeurs et les salariés. Certaines entreprises ont pu, en négociant leurs contrats, obtenir une baisse globale de celles-ci. Nous pouvons citer au moins un groupe multinational qui a réussi à intégrer la totalité de cette baisse dans ses NAO, faisant valoir une augmentation du pouvoir d’achat de ses salariés de l’ordre de 0,5% nets. L’entreprise a ainsi évité d’augmenter les salaires bruts et optimisé les remises de cotisations sociales consenties par le gouvernement sur… le financement des régimes de sécurité sociale.
La réforme en cours, en repoussant l’âge de départ à 62 ans et le droit au taux plein à 67 ans inverse cette tendance. Le risque de décéder dans l’entreprise ou de subir une incapacité liée à son activité professionnelle va à nouveau croître alors que la sécurité sociale « dérembourse » les soins et les indemnisations. En confirmation, les statistiques révèlent des disparités entre catégories socio-professionnelles. L’espérance de vie sans incapacité des hommes, ouvriers, est de 59 ans. Il y a donc une période de 3 ans (soit 2 de plus qu’auparavant) où ce risque est élevé.
On peut prédire donc, une augmentation des cotisations des régimes de prévoyance complémentaire (mutuelles) des salariés, et par extension des retraités qui continuent d’adhérer au contrat collectif dans les conditions de la loi Evin.
Au final, ce coût sera reporté sur les bulletins de paie des salariés dans des conditions plus ou moins favorables en fonction de la puissance des organisations syndicales dans la branche et/ou l’entreprise. Bien entendu, cela peut également se traduire par une baisse, voire une suppression des prestations complémentaires ou encore, une augmentation des cotisations décidée unilatéralement par l’employeur.
(Graphique : Alternatives Économiques)